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publié par Mélanie Fazi le 15/10/12
Françoiz Breut
- La chirurgie des sentiments
La chirurgie des sentiments

Quinze ans déjà qu’on tombait sous le charme de la première écoute de « Tarifa », avec ses nappes de guitares à la Tarnation et cette jolie voix au timbre si particulier. Depuis, on aborde les albums de Françoiz Breut en sachant qu’on y trouvera toujours quelque chose à aimer – et que, dans le meilleur des cas, ça donnera Vingt à trente mille jours et que ce sera une pépite qui marquera un moment de notre vie.

Friandises

Parfois, ils nous surprennent. La chirurgie des sentiments annonce d’emblée la couleur en s’ouvrant sur deux jolies friandises : « BXL Bleuette » à la rythmique gentiment rétro, hommage en demi-teinte à sa ville d’adoption, et « Marie-Lise » à la mélodie charmante. L’album réserve encore son lot de surprises, mais l’essentiel est dit. Il sera léger, caressant, apaisant et apaisé. Joyeux, souvent. Il y aura parfois de la gravité sous la surface, parce que c’est aussi l’essence de la vie et qu’on n’explore pas la carte des sentiments humains sans y gagner quelques blessures. Mais alors que les chansons les plus marquantes de Françoiz Breut étaient jusque là sombres ou poignantes (« Derrière le grand filtre », « Portsmouth », « Km 83 »), l’ambiance est ici sereine. La différence tient peut-être davantage aux arrangements ciselés, à la douceur des ambiances, qu’à l’écriture des morceaux et des textes. Même les chansons les plus mélancoliques – « Werewolf » et son orgue rêveur, « L’Astronome » et son séduisant jeu d’échos sur les voix – sont planants plutôt que plombants.

Au beau fixe

On pense parfois à la Suzanne Vega de Nine objects of desire, ce bel album tout en subtilité qui démontrait que le plus doux des murmures peut avoir davantage d’impact qu’un cri. La guitare bossa indolente de « Cabinet des curiosités » n’aurait pas déparé « Caramel ». La chanson évoque aussi le souvenir fugitif de Broadcast – quelque chose dans le dialogue entre cette ambiance pop un peu désuète et la façon qu’a le chant de faire traîner les syllabes. On enchaîne aussitôt sur deux morceaux dont la cadence sautillante appelle à la danse : « La chirurgie des sentiments » au texte savoureux (« Ou est-ce juste une histoire/de vaisseaux dans l’espace/de notre cage thoracique ? »), « Michka Soka » et son refrain entêtant. Plus l’album avance, plus il nous prend par surprise, plus il nous met le sourire aux lèvres et l’humeur au beau fixe. Un disque printanier pour égayer l’automne naissant.

Berceuse

On se laisse porter tout du long, on se laisse bercer, on s’y sent bien. C’est sans doute l’album le plus accueillant de Françoiz Breut, le plus lumineux, le plus chaleureux. Quelques écoutes suffisent pour savoir qu’on va l’aimer, et l’admirer pour sa capacité à nous surprendre. Si la noirceur fait parfois facilement illusion, la douceur et la demi-teinte demandent une aisance et un doigté certains. Un album dont l’écoute rend heureux, ce n’est pas donné à tout le monde. Raison de plus pour se laisser prendre par la main et retomber sous le charme. Comme la toute première fois, au son de « Tarifa ».

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publié par le 15/10/12