Rock en Seine est en train de devenir une tradition pour Le Cargo !, à l’instar de La Route du Rock que Renaud suit pour nous chaque année. Bien sûr on prête attention aux têtes d’affiches mais on fait surtout confiance à l’équipe de programmation qui propose toujours de belles découvertes sur les petites scènes ou offrent l’occasion à des groupes qui commencent à cartonner de se frotter à une bellle scène, à l’Industrie ou à la Cascade. Du coup les polémiques sur le manque de tête d’affiche ou la proportion rap-rock qui aurait fait du festival un "Rap en Seine" ça nous ait passé un peu au dessus de la tête. Même si elle comprend quelques trous et qu’effectivement on trouve aussi qu’une ou deux têtes d’affiche pour le rock manquent un peu, on a eu aucune difficulté à remplir nos listes de concerts pour les trois jours.
En arrivant sur place vendredi après-midi, un peu en avance sur le premier concert de la journée, on constate d’emblée que l’atmosphère est un peu différente. Au pied de la grande scène, la pelouse parait bien vide malgré le fait que l’espace ait été déjà réduit avec des zones réservés aux VIP et handicapés mais aussi en rajoutant des cloisons sur les pentes où es gens se mettaient sur les côtés. Et même si le premier concert du vendredi est forcément difficile à remplir, là c’est quand même un peu tristounet voir déstabilisant pour le groupe qui joue.
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Attaque 77
Mais Attaque 77, totalement inconnu de votre serviteur mais apparemment très appréciés en Amérique du Sud, n’a pas l’air déstabilisé, le trio guitare-basse-batterie envoie son punk-rock en espagnol avec beaucoup de professionnalisme. C’est carré, le son est tout à fait correct, la voix n’est pas particulièrement remarquable mais elle n’est pas désagréable non plus. Tout cela est néanmoins bien classique, le groupe est assez statique et ne fait pas vraiment le show. On avait lu que c’était l’équivalent de Noir Désir dans leur pays... euh on est loin du compte... Notre attention s’évapore donc assez rapidement. On écoute d’une oreille distraite en révisant la suite du programme. Au moment où l’on se dirige vers la scène suivante, ils amorcent un morceau un plus calme voir pop et on se dit que ça a l’air plus intéressant comme ça mais c’est déjà trop tard pour nous.
NONAME
Noname il fallait la mériter, le Bosquet, anciennement Pression Live, est à l’autre bout de Rock en Seine par rapport à la grande scène. On y allait sur la fois de son live chez NPR mais avec quelques réserves sur le chant un peu plat et l’accompagnent soft-jazz délivré par ses musiciens. Finalement c’est plutôt une bonne surprise, les musiciens sont en fait très bons et sur une vraie scène (vs le bureau de NPR) ils pratiquent un jeu beaucoup moins feutré. Noname (Fatimah Nyeema Warner de son vrai nom) a un début un peu plus laborieux, essentiellement à cause de la voix sous-mixée mais elle compense par une bonne occupation de la scène et une interaction permanente avec le public qui fait qu’on reste vraiment concentré sur elle et ses textes. Le son s’améliorera par la suite (ou il était simplement meilleur quand on s’est un peu reculé par rapport à la scène) et on passe un moment plutôt agréable. On aimerait juste qu’il y ait un peu plus d’intensité dans l’interprétation, des dynamiques qui varient plus, une peu plus de dramatisation pour casser le côté "ronronnant" qui s’installe sur un set de 30 ou 40 minutes.
First Aid Kit
On n’avait jamais vu First Aid Kit en concert et on imaginait un concert très folk, très intimiste avec les deux chanteuses suédoises un peu perdues dans l’immensité de la grande scène... et en fait pas du tout, Klara (guitares) et Johanna (basse) occupent le devant de la scène avec beaucoup de naturel et ont le charisme nécessaire pour mais derrière elles sont accompagnés de trois très bons musiciens, un claviériste, un batteur et un guitariste qui joue essentiellement du pedal-steel, potentiellement le plus beau son du monde. First Aid Kit en live ça sonne donc comme de la folk, mais de la folk avec un gros son avec quelques échappées assez rock. La bonne humeur des deux sœurs et de leurs musiciens fait plaisir à voir. La setlist est calibrée idéalement pour un festival, il commence à y avoir un peu de monde devant la grande scène, tout est réuni pour qu’on passe un bon moment même si on est pas spécialement connaisseurs.
Dirty Projectors
A voir ses cheveux en bataille et sa tenue qui pourrait passer sans problème pour son pyjama, On croirait volontiers que David Longstreth est venu directement de son lit à la scène. Il a ce côté cool, cette nonchalance qui le placerait plus du côté du Frat Boy des teen movies que du guitariste de jazz. Et pour notre plus grand plaisir il est un peu des deux : avec ses doigts, il joue des choses compliquées et un peu dissonantes sur sa guitare et en même temps il chante et l’ensemble a l’air facile, pas savant mais presque pop surtout quand les trois musiciennes qui l’accompagnent harmonisent leurs voix avec la sienne et là waouh c’est vraiment très beau... C’est rare de voir une musique aussi pointue rendue accessible et le tout joué par un groupe qui a l’air de se régaler et est à fond dans sa musique, tout en étant vraiment "face au public", en jouant pour lui.
The Orielles
On a découvert The Orielles pas très longtemps après leur concert à la Maroquinerie et on ne pensait pas les revoir de si tôt en France, à notre grand regret. Et oh bonheur les voilà dans la programmation de Rock en Seine 2018. Hors de question de les louper donc, on arrive donc bien en avance devant la scène Firestone pour pouvoir être au premier rang (pas d’accès possible pour les photographes autres que ceux de l’équipe Rock en Seine). On est pas les seuls à avoir repéré ce trio anglais car l’espace devant la scène Firestone se remplit bien et quand le groupe arrive, dans la lumière orangée de la fin d’après-midi, l’accueil est plutôt chaleureux et on sent qu’il y a quelques connaisseurs.
En live, la pop de The Orielles prend une tournure nettement plus rock et plus déjanté que le disque qui a une production très pop, limite dream-pop / psychédélique avec les sons de guitare blindés d’effet. C’est encore perfectible dans le son comme l’exécution mais les anglais confirment en beauté tout le bien qu’on pensait d’eux sur disque.
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Nick Murphy
Nick Murphy anciennement Chet Faker nous avait fait une grosse impression pour ses talents scéniques et le niveau du groupe qui l’accompagnait plus que pour l’originalité de la musique produite il y a quelques années au Pitchfork Paris. Depuis on avait un peu perdu sa trace et on s’attendait plus ou moins au même genre de set. Perdu ! ça commence très très fort, très très rock, une longue plage instrumentale pleine de guitares avec un Nick très remonté. Il avait déjà le charisme, si maintenant la musique devient vraiment excitante, on tient là peut être le concert du jour... les premiers morceaux, sur le même niveau d’énergie, le laisse à penser et puis non.. ça s’embourbe un peu, pas au point de devenir ennuyeux, le bonhomme se démène pour qu’il se passe toujours quelque chose et sa musique est définitivement plus énergique, c’est juste qu’il manque quelques mélodies fortes, des montées en puissance qui donnent du relief. Pas de quoi être déçu, plutôt le contraire mais on se dit qu’il manquait pas grand chose pour qu’on passe d’un concert à un show de folie.
Die Antwoord
Le duo sud-africain a annoncé que son prochain album 27 (comme le nombre de morceaux contenu) serait le dernier. La fin d’une belle aventure pour ce groupe sud-africain qui a réussi l’exploit plus qu’improbable de fédérer un public à la fois mainstream et indé autour d’une musique inspirée à la fois de la dance des années 90’s et du gangsta-rap, le tout avec une esthétique à la fois manga et très freakshow. ¨sur la grande scène transformée en bout de township, le groupe délivre un concert énergétique, déjanté et met le feu non-stop à un public qui danse, saute et scande les paroles provocatrices de Ninja et Yo-Landi
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Parcels
On était moyen chaud pour Parcels, en se basant sur les quelques morceaux qu’on a écoutés sur Spotify. Et au final ce fut carrément un rejet total et immédiat. Ça fait toujours bizarre de critiquer un groupe qui joue devant un parterre de fans ravis. On ne boude pas par plaisir ou snobisme musical, on voudrait bien être comme eux, manifester bruyamment un bonheur quasi-orgasmique à la vue de ses cinq anglais au look tête à claque. Mais impossible leur musique se résumer pour nous à essayer de reproduire le Get Lucky de Daft Punk à chaque titre... mais sans y arriver correctement ! Et c’est pas comme si Get Lucky c’était un chef d’oeuvre de la musique, un modèle qui mérite d’être reproduit encore et encore, c’est un tube opportuniste, aussi poussif et répétitif qu’à peu près tous les tubes de Daft Punk, qui n’invente rien voir copie-colle la musique du passé... Parcels je vais être dur mais c’est exactement le même problème : ils ne font que reproduire des vieux sons, des vieux airs sur des vieux instruments et ils ont l’air de vieux jeunes. On a juste pris le temps de faire les photos, on leur a laissé une chanson en plus au cas où et on a fuit le plus loin possible ?
Carpenter Brut
Voilà l’autre incompréhension totale de la journée : pourquoi Carpenter Brut connait un succès international et qu’est-ce que le public conséquent de la scène de l’Industrie trouve à ce trio instrumental, pas particulièrement charismatique, pas particulièrement talentueux techniquement, pas particulièrement original dans sa musique. On n’a tenu que trois ou quatre titres certes mais ça aurait du suffire pour comprendre l’intérêt de ce live et le succès de ce groupe. Mais non rien... excitation : 0, plaisir : 0, le rock’n’roll-omètre complètement à plat... Et pourtant devant la scène, les gens ont l’air de prendre leur pied... On va donc écouter attentivement le disque. Si ça se trouve les extraterrestres laveurs de cerveau sont arrivés et ils se servent de Carpenter Brut pour lobotomiser les foules...